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Repenser l'avenir de la finance : retour sur un atelier marquant consacré à l'IA et à la finance

Hamid Boustanifar (EDHEC) a organisé un atelier scientifique à Nice le 27 mai 2025 comprenant des présentations de type keynote sur divers sujets, données par des universitaires de renom et des experts du secteur issus d'institutions de premier plan. Retour sur cet événement !

Temps de lecture :
11 juin 2025
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Rethinking the Future of Finance: A Look Back at A High-Impact Workshop on AI and Finance

Hamid Boustanifar, Professeur associé à l'EDHEC et directeur académique du MSc in Corporate Finance & Banking, a organisé un atelier scientifique à Nice le 27 mai 2025. Cet événement comprenait des présentations de haut niveau sur divers sujets, données par des universitaires de renom et des experts du secteur issus d'institutions de premier plan. Chaque intervenant a présenté l'état actuel de la recherche dans son domaine, ses applications dans la finance et les perspectives d'avenir.

 

Réunissant environ 40 professeurs, chercheurs et doctorants issus de diverses disciplines (notamment la finance, l'économie, la comptabilité, les mathématiques, l'informatique et la physique), ainsi que des professionnels de l'industrie, cet atelier a favorisé un dialogue approfondi sur les nouvelles intersections entre la finance, l'apprentissage automatique, le big data et la durabilité.

 

Les retours ont été extrêmement positifs. Les participants ont salué la clarté, la pertinence et la rigueur des discussions, tandis que les intervenants ont souligné les avantages des présentations de type « keynote » pour explorer les liens entre des domaines distincts mais connexes de l'IA.

Accepter la complexité : l'apprentissage automatique et le nouveau paradigme de la tarification des actifs

L'atelier a débuté par une présentation de Semyon Malamud (EPFL), qui a remis en question un principe fondamental de l'économie : la préférence pour la parcimonie. Dans son exposé intitulé « Deep Learning in Finance », M. Malamud a soutenu, contrairement à l'opinion courante, que la complexité peut être une vertu et que l'augmentation de la complexité des modèles peut améliorer les prévisions de rendement des actions.

 

Sa conclusion principale : les portefeuilles basés sur l'apprentissage automatique obtiennent de meilleurs résultats lorsque la paramétrisation du modèle dépasse le nombre d'observations utilisées pour l'entraînement, à condition que cela soit fait de manière réfléchie. Cette idée remet en question l'orthodoxie économétrique traditionnelle et redéfinit le débat autour de la spécification des modèles. Comme l'a fait remarquer M. Malamud, si les économistes citent souvent George Box et William d'Ockham pour défendre la simplicité, ces principes peuvent conduire à ce qu'il appelle « l'erreur d'Ockham », c'est-à-dire une simplification excessive dans un monde où aucun modèle n'est jamais vraiment « correct ».

 

 

Le chemin vers une IA financière plus intelligente : passé, présent et avenir

Dans une présentation dynamique et prospective, Peter Hafez, Chief Data Scientist chez RavenPack, a présenté le point de vue d'un praticien sur l'évolution de l'intelligence artificielle sur les marchés financiers. Son intervention, intitulée « The Journey Towards Smarter Financial AI », a offert à la fois une rétrospective du domaine et une vision stratégique pour l'avenir.

 

M. Hafez a commencé par souligner les profondes transformations que connaissent les processus financiers, non pas sous l'effet d'un engouement passager, mais grâce aux progrès réalisés dans les infrastructures de données, les outils d'IA et les systèmes intelligents. S'appuyant sur plus de 15 ans d'expérience dans la finance quantitative, il a illustré comment des technologies telles que les systèmes de recherche de contenu, les grands modèles linguistiques (LLM) et les agents autonomes modifient la manière dont les institutions traitent l'information et prennent leurs décisions.

 

Son message principal était un appel à passer de l'engouement à l'application. Si les LLM sont indéniablement puissants, leur véritable valeur réside dans leur capacité à s'intégrer efficacement dans des cas d'utilisation financière spécifiques, de l'analyse des sentiments à la surveillance des marchés et à la prévision des risques.

À travers des exemples concrets et les enseignements tirés chez RavenPack, M. Hafez a souligné l'importance du pragmatisme, de l'évolutivité et de la pertinence du domaine lors du déploiement de l'IA dans le secteur financier. Son intervention a trouvé un écho particulier auprès des étudiants et des professionnels désireux de comprendre comment la théorie se traduit dans la pratique dans l'environnement actuel, caractérisé par l'évolution rapide des données.

 

 

IA et investissement quantitatif : libérer le potentiel de la prochaine génération d'alpha

Dans sa présentation « AI and Quant Investing », Mike Chen (responsable de la recherche Next Gen chez Robeco) a examiné comment l'intelligence artificielle, l'apprentissage automatique et la durabilité redéfinissent les frontières de l'investissement quantitatif.

 

Il a présenté des arguments convaincants sur la manière dont ces nouveaux outils peuvent aider à détecter des signaux non traditionnels et à élaborer des cadres d'investissement adaptatifs. Cependant, M. Chen a également mis en garde contre le fait que l'intégration de ces nouvelles méthodologies dans les cadres existants comporte à la fois des opportunités et des défis, allant de l'interprétabilité des modèles à la compatibilité avec les systèmes de gestion des risques et les normes réglementaires.

 

Fort d'une expérience acquise chez BlackRock, PanAgora, Google et dans le milieu universitaire (MIT), M. Chen a apporté un point de vue rare, à la croisée de la recherche de pointe et de la gestion de portefeuille dans le monde réel. Son intervention a souligné que l'avenir de l'investissement quantitatif dépend non seulement de l'innovation, mais aussi d'une gouvernance solide, d'une réflexion interdisciplinaire et d'un engagement en faveur de la création de valeur à long terme.

 

 

Quand la finance rencontre les réseaux sociaux : comprendre les marchés sous un nouvel angle

Dans cette présentation intitulée « Finance in Social Media: The Future », Tony Cookson (Leeds School of Business, Université du Colorado à Boulder) a examiné l'un des domaines les plus dynamiques d'aujourd'hui : l'intersection entre les médias sociaux, l'intelligence artificielle et la prise de décision financière.

 

M. Cookson a redéfini les réseaux sociaux comme étant plus qu'un simple bruit : ils agissent comme une loupe sur le comportement économique, révélant des signaux qui reflètent les dynamiques sociales et financières sous-jacentes. S'appuyant sur ses propres recherches empiriques, il a souligné comment des plateformes telles que Twitter, Reddit et Google Trends peuvent offrir de puissants indicateurs prédictifs des comportements dans des domaines tels que le logement, le commerce et la mobilité économique.

 

L'un des thèmes clés était le double rôle de l'IA dans ce domaine. D'une part, l'IA permet de détecter des concepts auparavant impossibles à mesurer, révélant ainsi des tendances subtiles dans l'opinion publique et le comportement des marchés. D'autre part, l'essor des contenus générés par l'IA soulève des questions : l'IA démocratise-t-elle l'accès à des informations précieuses ou les dissimule-t-elle derrière de nouvelles couches de complexité ?

Les travaux de M. Cookson montrent que le contenu des réseaux sociaux présente souvent une cohérence interne et un pouvoir prédictif. Ses recherches illustrent, par exemple, comment l'analyse textuelle du contenu généré par les utilisateurs peut éclairer les stratégies d'investissement et comment le comportement en ligne reflète les tendances régionales ou spécifiques à certains actifs.

 

La session a encouragé les participants à réfléchir de manière critique à la manière dont l'IA et les réseaux sociaux ne se contentent pas de transformer la communication, mais remodèlent également le tissu informationnel des marchés modernes.

 

 

Réseaux et finance : une histoire de connexions

Dans une présentation intitulée « Réseaux et finance : une histoire de connexions », Renaud Lambiotte (Université d'Oxford) a détaillé aux participants les puissants outils de la science des réseaux pour comprendre les systèmes financiers.

 

Expert en modélisation de réseaux complexes, M. Lambiotte a souligné que la finance repose fondamentalement sur les connexions entre les institutions, les actifs, les agents et les flux d'informations. À l'aide d'outils issus de la théorie des réseaux, il a illustré comment mieux analyser la contagion, le regroupement, le risque systémique et la propagation de l'influence.

 

S'appuyant sur des exemples tirés des systèmes financiers et sociaux, il a montré comment les réseaux temporels, la détection de communautés et la dynamique non linéaire peuvent fournir des informations approfondies sur les comportements interconnectés. Il a également expliqué comment les réseaux aident à mettre au jour la géométrie cachée des interactions financières, offrant une compréhension systémique qui va au-delà des modèles linéaires.

 

Cette conférence a fait le lien entre la physique théorique et la finance moderne, laissant au public une impression forte de la manière dont la pensée en réseau peut révéler les vulnérabilités, les modèles de résilience et les dynamiques émergentes dans le monde financier complexe d'aujourd'hui.

 

 

Relier la finance, la science du climat et le langage : vers des connaissances exploitables

Dans sa présentation, Markus Leippold (Université de Zurich et Google DeepMind) a présenté une vision convaincante de l'intégration de la finance, de la science du climat et du traitement du langage naturel (NLP) afin de générer des informations exploitables à l'ère de l'investissement durable.

 

Les recherches de M. Leippold portent sur l'analyse de la communication des entreprises en matière de climat, des rapports de développement durable aux résultats financiers, à l'aide de modèles d'IA avancés. Ses conclusions mettent en évidence l'opacité et l'incohérence d'une grande partie du discours actuel sur le climat, ce qui complique les efforts visant à évaluer les progrès réels des entreprises.

 

À l'aide de l'apprentissage automatique, M. Leippold et ses collaborateurs identifient les modèles de lobbying climatique, détectent le greenwashing et évaluent la transparence. Il a souligné que le langage est plus qu'un simple moyen de communication, c'est une riche source de données. Une fois correctement analysé, il révèle les divergences entre les discours et les actes des entreprises, ce qui constitue des informations cruciales tant pour les politiques que pour les investissements.

Il a également présenté Frigg, une plateforme qu'il a cofondée afin de mettre en relation des investisseurs soucieux du climat avec des projets durables vérifiés, démontrant ainsi comment la recherche universitaire peut stimuler l'innovation pratique à la croisée de la technologie et de la finance verte.

 

 

Cryptomonnaies, blockchain et l'avenir de la finance

 

Marco Di Maggio (Imperial College London) a conclu l'événement par un discours sur la cryptographie, la blockchain et la disruption fintech, développant les travaux précédemment menés à la Harvard Business School.

 

Il a fourni des informations détaillées sur les caractéristiques des investisseurs sur ces marchés et a exploré les développements futurs susceptibles de révolutionner la finance et les secteurs connexes.

 

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Un impact retentissant : réflexions et élan pour l'avenir

L'atelier a non seulement mis en avant une expertise de classe mondiale à la croisée de la finance, de l'IA et de la science des données, mais il a également suscité un engagement intellectuel profond au sein des communautés universitaires et professionnelles.

Des modèles de transformateurs dans l'optimisation de portefeuille aux utilisations stratégiques des LLM dans la finance, les discussions ont fourni des informations exploitables qui façonnent déjà des projets au sein de grandes institutions financières. La qualité et la profondeur des échanges ont été largement saluées, et de nombreux participants ont exprimé leur vif intérêt pour la poursuite de la collaboration et les prochaines éditions.

Dans l'ensemble, le succès de cette édition confirme la valeur de l'initiative et crée un précédent solide pour sa poursuite dans les années à venir. Comme l'a fait remarquer l'un des participants : « L'atelier nous a donné matière à réflexion et m'a personnellement motivé à approfondir mes connaissances sur les applications de l'IA dans le domaine financier. »

 

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