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MANAGEMENT À DISTANCE : PARTAGE D’EXPERIENCE – AVEC ANNE FESSAN, DIRECTRICE DES PROGRAMMES DE FORMATION ENTREPRISE

La crise que nous traversons a montré beaucoup de points positifs concernant le management à distance. Tout d’abord, managers et managés, nous sommes parvenus à poursuivre nos activités dans un…

Temps de lecture :
15 juin 2020
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La crise que nous traversons a montré beaucoup de points positifs concernant le management à distance.
Tout d’abord, managers et managés, nous sommes parvenus à poursuivre nos activités dans un contexte des plus atypique.
Nous avons tous beaucoup appris, et il me semble utile de partager nos enseignements respectifs pour faire progresser "le" management à distance en général.
Voici donc les enseignements que je tire de cette période, en tant que Directrice des programmes de formation entreprise de l’EDHEC.  Je vous invite, manager ou managé à partager les vôtres en commentaires, pour compléter ce qui ne reflète que la perception d’une personne ici, et ne saurait en aucun cas constituer un dogme.

 

Anticiper les conditions matérielles

Comme nombre d’entre vous certainement, la plupart des membres de notre équipe avait déjà expérimenté le travail à distance avant la crise.

Quelques semaines avant le confinement, toutefois, sentant le risque se préciser, notamment au cas où une contagion avérée sur le site nous aurait obligé à fermer, je me suis organisée pour que tous les membres de l’équipe soient équipés du matériel nécessaire pour pouvoir assurer la continuité des opérations en cas de fermeture du jour au lendemain.

Nous avons évoqué ensemble le fait que cela pouvait se produire à tout moment et nous sommes organisés pour ne pas être pris au dépourvu. Intellectuellement nous étions prêts. Par ailleurs,

  • Nous avons réalisé une sauvegarde de nos fichiers partagés sur un disque dur externe, afin de pouvoir les partager sur Onedrive en cas de besoin.
  • Chaque soir, nous emportions avec nous le matériel nécessaire pour travailler à distance dès le lendemain si nécessaire.
  • Nous avons fait le point sur les outils à notre disposition. Pour la plupart, nous les avions déjà testés, cependant le niveau de maîtrise n'était pas homogène au sein de l'équipe.

Depuis, nous avons remis à jour notre liste : le travail à distance prolongé a notamment mis en évidence l'importance du clavier déporté en plus de la souris, dont l'utilité nous avait échappé dans l'urgence !

 

Définir ensemble les conditions de succès

Dès que le travail à distance de l'ensemble de l'équipe Formation entreprises s'est imposé à nous, nous nous sommes réunis sur Teams pour convenir de notre organisation.

Durant ce premier échange, qui a duré 2 heures, nous avons

  • Fait un point sur la manière donc chacun vivait la situation
  • Partagé les contraintes qui pouvaient impacter le travail (enfants déscolarisés, contraintes familiales, médicales etc)
  • Défini ensemble le besoin de l’équipe en matière de rituels : à quelle fréquence fallait- il échanger, durant combien de temps, quels étaient les sujets à aborder. Le souhait de l’équipe a été d’avoir un échange quotidien d’une heure réunissant tout le monde, complété si besoin par des points spécifiques. Ainsi, nous pourrions partager les informations clés, nous répartir les tâches, et assurer un lien social.
  • Notre assistante a accepté de devenir "super utilisateur" de l'outil Teams que tout le monde ne maîtrisait pas. Elle a rédigé un mode opératoire simple à utiliser et très complet. Ce document a non seulement permis à l'équipe d'être totalement autonome sur Teams 2 jours plus tard, mais nous avons pu le partager avec les autres services qui l'ont beaucoup apprécié. Nous avions identifié le besoin de faciliter la prise en main de cet outil par nos partenaires externes. Au-delà de son utilité immédiate, il nous servira dans la durée. Elle a réalisé bien d'autres modes opératoires au cours des semaines suivantes !
  • Partagé de bonnes pratiques en matière d'organisation du poste de travail
    Dès la première semaine notre objectif a été de faire le point sur les outils de fonctionnement à distance à notre disposition.

 

Préserver le lien social

Dès le premier jour, l'équipe a fait part de son besoin de garder l'esprit de convivialité qui règne lors de nos échanges

  • Nous avons ouvert un Whatsapp d’équipe uniquement destiné à l’échange non opérationnel – pas question d’y parler formation entreprise ! Il nous a permis d’y partager des vidéos amusantes, des contenus divers, quelques photos de moments choisis entre nous pour garder le sourire. Le fil fonctionnait à plein pot le soir je dois dire ! Il nous arrivait souvent d'en rire ensemble le lendemain.
  • Au début de notre réunion quotidienne, nous consacrons un temps pour prendre des nouvelles les uns des autres. Nous sommes une petite équipe et la parole s'est naturellement distribuée en quelques jours, de sorte que rarement plus de 15 minutes ont été consacrées à ce "cadre ouvert", sauf en tout début de confinement. Au fil du temps, chacun trouvait un temps dans la semaine pour partager une difficulté personnelle ou simplement une anecdote, une activité réalisée la veille au soir ... Un peu comme nous l'aurions fait en prenant un café ensemble au bureau finalement.
  • Il est vite apparu que chacun vivait la situation différemment en matière de ressenti, d’impact sur le sommeil etc. Cela permettait aussi à toute l’équipe d’être plus compréhensif sur les journées où l’un d’entre nous était moins en forme. Nous avons également pu échanger nos astuces pour se préserver, retrouver le sommeil, etc. Le fait d'en parler, de voir que d'autres ressentaient les mêmes difficultés ont également aidé je pense.

Ce moment d’introduction est vite devenu également un moment de rire, de partage, d’intelligence collective. Cela nous a aussi permis de prendre du recul sur certains sujets d’actualité ... Le fait de pouvoir exprimer, même rapidement, ce qui allait bien et moins bien, de débattre d'un sujet, permettait ensuite à toute l’équipe d’être pleinement présent au reste de la réunion.

A l'approche du dé-confinement, nous avons échangé sur les questions que soulevaient la perspective de reprise du travail, et les inquiétudes de chacun. Cela m'a permis de faire remonter de manière anonyme des questions très pertinentes auxquelles notre Direction devait apporter des réponses.
Ce moment d’introduction est vite devenu également un moment de rire, de partage d’anecdotes, d’intelligence collective pour prendre du recul sur certains sujets d’actualité etc. Le fait de pouvoir exprimer même rapidement ce qui allait bien et moins bien permettait ensuite à toute l’équipe d’être pleinement présent au reste de la réunion.

 

Garder un cap, donner du rythme mais préserver les marges de manoeuvre individuelles

Le deuxième jour, nous avons fait le point sur les différents projets, établi des documents partagés afin que chaque membre de l’équipe puisse y accéder (également au cas où l’un de nous tomberait malade)

Nous avons notamment créé :

  • Un document listant les actions urgentes à suivre par chacun, ainsi en cas de besoin il était possible de prendre le relais facilement. Parmi ces actions figurait l'enjeu de pouvoir accompagner nos intervenants dans la digitalisation rapide des programmes, afin d'offrir le choix à nos clients entre le maintien des parcours et le report. Toute notre équipe s'est formée à l'outil de classe virtuelle de l'EDHEC. Ainsi, nos intervenants se sont-ils sentis soutenus et accompagnés lorsqu'ils ont été sollicités pour animer des formations entreprise à distance.
  • Un document "actions de fond" que chacun de nous a complété lui-même et présenté en réunion les jours suivants. L’objectif était de nous donner de la perspective et de mettre à profit une possible baisse d’activité à venir pour faire avancer ces actions que nous n’avions jamais pu réaliser faute de temps, pris par l’opérationnel. Cela nous a aussi permis de formuler des suggestions d'actions permettant d'améliorer nos modes de fonctionnement immédiats et futurs, l'expérience clients etc.

Le reste de la réunion n’a jamais été un moment de pilotage de la "to do" de chacun : chaque membre de l’équipe avait ses urgences, et ses activités de fond à travailler et pouvait organiser son temps de travail comme il le souhaitait.

Le seul mot d’ordre que nous avons partagé rapidement a été de faire attention à compartimenter les activités, veiller à se reposer, se distraire.

Je n'ai jamais organisé de réunion avant 9h30, après 17h ou encore à l'heure du déjeuner ainsi, cela laissait une marge de manoeuvre suffisante à chacun pour pouvoir s’organiser librement, sortir s’aérer, faire les courses, gérer le quotidien, sans avoir à se justifier.

Nous avons créé un document "actions de fond" dont l’objectif était de nous donner de la perspective et de mettre à profit une éventuelle baisse d’activité à venir pour réaliser des actions que nous n’avions jamais pu réaliser faute de temps, pris par l’opérationnel.

 

Tenir les délais

Notre temps d’échange durait 1 heure et, après l'introduction dont nous avons parlé, consistait en un tour de table, où chacun prenait (ou non) la parole pour

  • Partager une problématique et demander de l’aide,
  • Partager un apprentissage avec le groupe (un nouvel outil digital, une manière d’utiliser excel ou ppt plus efficacement, les points-clés d’un webinar suivi la veille etc),
  • Présenter une activité en cours pour recevoir un feedback ...
  • Echanger des informations, des bonnes pratiques (optimiser son poste de travail à la maison !)

Il est vrai qu’au cours des semaines de confinement, quelques réunions ont consisté en 45 minutes d’échanges très informels et de rires pour 15 minutes de partage sur l’opérationnel, mais le plus souvent, c’était l’inverse.

Toutes nos réunions ont été tenues dans le timing imparti. Si un sujet nécessitait une séance de travail entre 2 ou plusieurs membres de l’équipe, un rendez-vous complémentaire était pris, éventuellement, nous convenions de l'aborder un jour suivant.

 

Péréniser

Nous sommes mi-juin, notre réunion quotidienne a toujours lieu. L’équipe souhaite la maintenir et y a trouvé une source de gain d’efficacité considérable d’une part, et le nombre de mails que nous échangeons s’en est trouvé considérablement réduit. Teams permettant en plus d’échanger des informations au sein de groupe en synchrone ou asynchrone, dans un style concis, nos backlogs de mails étant réduit, le reste de la journée nous permet de nous focaliser totalement sur nos actions.

Nous avons réalisé une quantité d'actions de fond considérable ! Nos processus sont simplifiés, certaines activités ont été automatisées, nous avons travaillé la qualité de nos visuels, proposé de nouvelles offres de formation entreprise etc.

Cela peut sembler étrange, mais nous avons gagné en proximité et en efficacité assurément. La réunion n’a jamais été obligatoire et pourtant, sauf congé ou impératif client, personne n’a raté un seul rendez-vous. Si je ne suis pas disponible, la réunion a lieu sans moi.

J’ai passé de longues années dans l’industrie automobile où je dois dire que j’avais conçu une haine farouche pour ce type d’échanges quotidiens. Ils étaient organisés à des horaires qui ne me convenaient pas, ne contenaient aucun moment convivial, duraient 50 minutes pour 5 annoncées... et consistaient en une revue de casernement où il fallait justifier son action, rendre des comptes mais où l’on obtenait rarement le support dont on avait besoin.

Lorsque l’équipe a souhaité un échange quotidien je me suis promis que ce rendez-vous ne ressemblerait jamais à cela et qu’il resterait utile et convivial. Il me semble que nous avons atteint cet objectif et même les jours où l'un d'entre nous ne se sent pas en forme, l’énergie que nous apporte notre rendez-vous quotidien est toujours positive.

Un immense merci au passage à tous les membres de cette équipe, dont chacun a contribué à ce succès collectif.

Et vous ? Manager, managé, quelles sont les bonnes pratiques que vous avez mises en oeuvre ? Quelles sont celles qui, selon votre expérience, ne sont pas efficaces ? Découvrez aussi quelles leçons de management pouvons-nous tirer du confinement.

 

Par Anne Fessan, Directrice des Programmes Sur-Mesure et de la formation entreprise. 

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