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Comment les stratégies de vente personnalisées peuvent redonner un avantage concurrentiel au commerce physique

Yenee Kim , Assistant Professor
Richard G. McFarland , ESSEC

Comment une simple interaction en magasin peut-elle devenir un levier commercial puissant ? Dans une étude récente (1), Yenee Kim (EDHEC) et Richard G. McFarland (ESSEC) explorent le concept de vente adaptative. Cette approche, fondée sur l'écoute active et l'agilité relationnelle, replace le vendeur au cœur de l'expérience client et offre aux détaillants traditionnels une stratégie puissante pour contrer la montée en puissance du commerce électronique.

Temps de lecture :
20 Aoû 2025
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Le commerce en ligne continue de grignoter les parts de marché des magasins traditionnels. Face à des prix agressifs, à la commodité et à la rapidité, que peuvent offrir les magasins physiques pour rester attractifs ?

Quelque chose que les plateformes numériques ont encore du mal à reproduire : l'interaction humaine. Un vendeur réactif peut interpréter des besoins "vagues", fournir des conseils personnalisés et rendre l'expérience d'achat plus intuitive. C'est la promesse de la vente adaptative.

 

Remettre les relations humaines au cœur de l'expérience d'achat

Le concept de vente adaptative repose sur la capacité du vendeur à adapter sa communication (et ses réponses) au profil de chaque client, tant en termes de style d'échanges que de contenu. Plutôt que de proposer un argumentaire standard, le vendeur adaptatif évalue rapidement le degré de précision de l'objectif du client et le type de produit qu'il recherche.

 

Yenee Kim, Assistant Professor à l'EDHEC Business School, et Richard G. McFarland, Professeur à l'ESSEC Business School, ont mené une étude qui montre qu'une approche nuancée et personnalisée améliore non seulement l'expérience d'achat, mais entraîne également une augmentation significative des ventes.

 

Deux variables sont au cœur de cette dynamique : la clarté de l'objectif du client, appelée « spécificité de l'objectif d'achat » (SGS en anglais pour "shopping goal specificity"), et la nature du produit, qu'il soit utilitaire ou axé sur le plaisir. Un client ayant un objectif clair et précis (comme l'achat d'un smartphone avec des spécifications particulières) doit être abordé différemment d'un autre qui parcourt le magasin sans idée précise.

 

Comprendre les objectifs d'achat des clients pour adapter le discours commercial

Lorsqu'un client exprime une demande claire et précise concernant un produit (i.e a un SGS élevé), il attend une réponse factuelle et structurée. Il cherche à être rassuré par des données objectives : spécifications techniques, garanties, mesures de performance, durabilité, ergonomie. Cela est particulièrement vrai pour les produits utilitaires.

 

En revanche, si l'objectif d'un acheteur est vague ou s'il dit simplement qu'il « ne fait que regarder », une approche émotionnelle est plus appropriée. Décrire les sensations procurées par un produit, l'ambiance qu'il crée ou le confort qu'il offre peut être beaucoup plus efficace, en particulier lorsqu'il s'agit d'achats plaisir tels que les parfums, les bijoux ou la décoration intérieure.

 

La capacité à passer d'une tactique de vente factuelle à une tactique émotionnelle en fonction de la situation est au cœur de la vente adaptative. Une équipe de vente bien formée peut activer différents leviers de persuasion en fonction du produit et de l'état d'esprit de l'acheteur.

 

Les résultats de l'étude de Kim et McFarland soulignent le fort impact de cette approche : lorsque la tactique d'influence sur la vente est correctement alignée sur le niveau de spécificité de l'objectif d'achat du client et le type de produit, les ventes moyennes par client augmentent de 105 % et les taux de conversion augmentent de 50 %. À l'inverse, le manque de personnalisation entraîne une perte significative de revenus potentiels.

 

Former des commerciaux en contact direct avec la clientèle pour une relation client personnalisée

Au-delà de ces chiffres, l'étude propose des solutions concrètes pour mettre en œuvre la vente adaptative dans les magasins de détail.

 

La première étape consiste à aider les vendeurs à identifier clairement l'objectif du client dès le début de la conversation. Une simple question telle que « Vous cherchez quelque chose en particulier ou vous jetez juste un œil ? » peut immédiatement révéler la direction à prendre. En fonction de la réponse, le vendeur peut choisir entre une explication technique ou un argumentaire sensoriel et émotionnel.

 

Le deuxième facteur consiste à adapter le message au mode de traitement de l'information du client. Si celui-ci a un état d'esprit concret et axé sur des objectifs, motivé par des achats spécifiques et la recherche de produits utilitaires, l'interaction doit se concentrer sur des informations factuelles sur le produit. Si les clients ont un état d'esprit abstrait et curieux, motivé par des objectifs d'achat spécifiques et la recherche de produits d'agrément, ils seront plus réceptifs aux messages qui évoquent les avantages émotionnels du produit. Cette idée, appelée « fluidité du traitement », est souvent négligée, mais elle est essentielle pour rendre l'information facile à comprendre, ce qui renforce la persuasion.

 

La valeur de la vente adaptative va bien au-delà de l'augmentation des ventes à court terme. La personnalisation des relations avec les clients renforce la satisfaction, la confiance et la fidélité. À une époque où les consommateurs disposent de multiples canaux d'achat et sont de plus en plus imprévisibles, ce capital relationnel devient un atout stratégique essentiel pour les magasins physiques. Il ne s'agit pas seulement de vendre un produit, mais aussi de créer une expérience mémorable qui justifie la visite du magasin.

 

Avec l'essor de l'IA, des algorithmes de recommandation et des parcours d'achat automatisés, la capacité à percevoir, interpréter et s'adapter aux besoins spécifiques d'un client donne un nouveau sens au rôle du vendeur. Repérer une hésitation, déceler un intérêt tacite ou reformuler des attentes floues sont autant de micro-compétences qui ne sont pas innées. Elles s'acquièrent, se pratiquent et se perfectionnent grâce à une formation continue et à l'observation. Pour les gérants de magasin, investir dans ces compétences est une décision intelligente et tournée vers l'avenir.

 

L'étude de Kim et McFarland le démontre clairement : face à la croissance du commerce électronique, la vente adaptative offre aux magasins physiques un moyen significatif de se différencier. Les décisions d'achat des consommateurs sont rarement purement rationnelles ; elles sont également émotionnelles, contextuelles et relationnelles. Et dans ce domaine, la technologie n'a toujours pas remplacé l'intuition, l'empathie et la nuance d'un vendeur (humain) compétent.

 

 

Références

(1) Yenee Kim & Richard G. McFarland, 2024. "Are you looking for something specific or just looking around? Adaptive selling on the basis of customer shopping goals in retail sales," Journal of the Academy of Marketing Science, Springer, vol. 52(6), pages 1780-1804, November - https://ideas.repec.org/a/spr/joamsc/v52y2024i6d10.1007_s11747-024-01015-y.html

 

 

Photo de 50 Fox sur Unsplash

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