Vieux maîtres, nouveaux médias
L’enjeu d’aujourd’hui est de désacraliser le musée et d’en faire un lieu attractif et facile à partager sur les médias sociaux. Le Palais des Beaux-Arts de Lille a fait appel aux étudiants de l’EDHEC pour les aider à toucher un public plus jeune et engagé dans le numérique....
Comment renverser 200 ans de révérence silencieuse face aux œuvres d’art classique ? En quête d’un public plus jeune et engagé dans le numérique, le Palais des Beaux-Arts de Lille s’est tourné vers les étudiants de l’EDHEC pour trouver un souffle iconoclaste.
01 L'objectif
Après la Révolution française, une grande quantité d’œuvres d’art est devenue la propriété du peuple. Ces œuvres étaient désormais patrimoine de la nation, destinées à être apprécié par tous. Le Palais des Beaux-Arts de Lille n’est qu’un des musées nationaux français qui a été bâti pour abriter ces fabuleuses collections. Toutefois, ces galeries d’art sont depuis récemment perçues comme étant le pré-carré d’une certaine élite. La population se sent exclue et beaucoup boudent ces musées, malgré la gratuité pour les jeunes. L’enjeu d’aujourd’hui est de désacraliser le musée et d’en faire un lieu attractif et facile à partager sur les médias sociaux.
02 Le problème
Les caractéristiques qui rendent le Palais si majestueux sont également à l’origine de ce désintéressement. L’ampleur de ces musées, qui n’est pas sans évoquer la majesté de nos cathédrales mettent de nombreux visiteurs mal à l’aise. Burno Girveau, Directeur du Musée, le rappelle : « Le musée s’est éloigné de ses visiteurs en confisquant leur voix ». Conscient de cet obstacle insoupçonné, il insiste sur le fait que l’objectif est désormais de donner aux visiteurs les moyens de contribuer activement aux trésors de connaissance du musée. Mais de quelle manière ? Un projet collaboratif pionnier entre le musée et Wikimedia a encouragé chacun à créer du contenu ouvert, en publiant leurs photos du musée en ligne. Mais l’adhésion a été lente, seul un nombre limité de photos a été mis en ligne sur la plateforme WikiMuseum en un an. Les visiteurs craignent de braver un interdit en photographiant ces œuvres et pourtant, s’agissant d’œuvres d’art anciennes, cette pratique est tout à fait permise.
03 L'amusement
Si personne n’ose briser le silence de pierre qui règne sur le Musée, une bande d’étudiants de l’EDHEC en sera-t-elle capable ? Dans le cadre du cours Entertainment, Guergana Guintcheva, professeur de marketing et directrice du programme MSc Marketing, a mis ses étudiants à l’épreuve. Grâce à un accord passé avec le Musée, les étudiants de l’EDHEC y ont obtenu un accès exclusif et gratuit pendant trois heures. Ils ont pu explorer, entièrement libres de leurs mouvements, l’ensemble de ce site fabuleux. Ils se sont glissés dans la peau d’un visiteur, ont interagi avec les œuvres et posé entre eux avec des statues anciennes ou des peintures à l’huile classiques, imaginé des activités amusantes avec des amis. Finalement, ils ont pris des selfies et les ont téléchargés sur la plateforme WikiMuseum.
04 L'analyse
Après avoir galopé dans les couloirs sacrés de la galerie, il était temps de laisser libre cours à leur imagination. Répartis en groupes, les étudiants ont fait un bilan de leurs observations et leur ressenti, et ont cherché des moyens créatifs de conjurer le manque d’enthousiasme et d’inciter les autres visiteurs à leur emboîter le pas. Cet atelier de trois heures a permis de mettre en évidence des sources de déplaisir auxquels ils étaient particulièrement sensibles, étant jeunes, mais qui étaient passés inaperçus aux yeux de l’équipe du musée. Parmi les éléments problématiques relevés, les étudiants ont remarqué que le téléchargement de leurs selfies sur Wikimedia était étonnamment laborieux. Pour résoudre ce problème, les étudiants ont préconisé un téléchargement aussi rapide et facile que tout autre réseau social.
05 Les résultats
Après avoir été informé au préalable par le Musée et Wikimedia, les étudiants sont devenus les acteurs d’une expérience privilégiée. En effet, ils ont été surpris par la transformation qu’ils ont eux-mêmes vécue. Au-delà d’un exercice classique et scolaire de stratégie marketing, ils ont pu confronter leurs idées reçues à la réalité. Les solutions préconisées étaient diverses, certaines plus réalisables que d’autres. Parmi les plus utiles, citons les propositions visant à simplifier le processus de téléchargement des photos, en commençant par un prospectus plus simple. Le musée a également apprécié leur concept de mur en temps réel pour afficher les photos au fur et à mesure de leur publication.
